Epilogues

C’est fini. Le siège, ou plutôt l’assaut sur Altdorf, est fini. La capitale impériale a résisté à la grande armée des hommes-bêtes provenant de tout le Sud-Est de l’Empire mais également de Bretonnie. Mais surtout Atldorf a survécu aux terrifiants pinces vampires qui se donnent pour nom les Dragons de Sang.

Les héros ont été nombreux à se distinguer, et malheureusement beaucoup sont tombés dans la défense de la cité.
Mais avant de nommer précisément les vaillants cœurs qui ont participé à sauver Altdorf il faut commencer par parler du peuple, commun et modeste, aristocrate et lettré, qui a lutté et surtout survécu.
Et si le peuple dans son ensemble a réussi à connaître le matin de la victoire le premier héros à féliciter est Karl Parner, premier Intendant des Canaux, Fosses et Caves d’Altdorf, qui il y a 17 ans, émis un décret pour que chaque Altdorfois bénéficie d’un refuge souterrain en cas de mise à sac de la cité. Ainsi si les rues et avenues, masures, maisons et immeubles, étaient presque tous déserts, c’est que la majorité du peuple s’était réfugié sous terre le temps que l’orage passe.
Karl Parner, mort 3 ans avant le siège, ne sut jamais que son décret avait sauvé tant de vies. On commémora en son nom une nouvelle fontaine en lieu et place de celle détruite par le grand serpent-démon.

Une fois justice rendue à cet humble fonctionnaire de la cité citons le nom de quelques héros de la bataille d’Altdorf.

Ana Blanquez-Ramos, capitaine de l’Ordre de la Lance de Vertu de Myrmidia, qui après que la porte ouest céda suite à une explosion ourdie par des traites, mena non seulement les troupes de son Ordre mais aussi tous les autres défenseurs présents, pour briser l’assaut d’une furieuse horde d’hommes bêtes. Elle périt lors de cette bataille mais beaucoup de ses suivants peuvent raconter sa bravoure en maniant la lance.

Lors de ce même assaut les admirables jumeaux nains, Kahir et Almanir Rougeenclume, se distinguèrent en manœuvrant avec adresse et panache le grand charriot de guerre nain. Ils succombèrent aussi quand, demandant à tous les mécaniciens présents de quitter le charriot, ils restèrent pour faire exploser le chef d’œuvre de l’ingénierie naine au cœur des cohortes bestiales.

Comment ne pas parler d’Ernest dit l’Epervier, un malandrin appartenant à la sinistre organisation criminelle des Crochets ? Ce personnage peu recommandable parvint, par ruse, à entrainer des centaines de non-vivants dans un large et profond puits. Les répugnants morts-réanimés s’entassèrent les uns sur les autres sur des dizaines de mètres, remplissant un réservoir totalement étanche, incapables de remonter à la surface, grattant impuissant les pierres de leur prison.

On ’n’oubliera pas l’astucieux Peter-Une-Patte, qui mena la défense de l’Hospice de Shallya contre hommes-bêtes, morts-vivants et démon-chat. Tous les indigents qui lui doivent la vie, ainsi que bien des sœurs, reconnurent qu’il avait l’étoffe d’un chef courageux et perspicace. Le jeune homme fut récompensé par sa bravoure par son ancien ennemi personnel, le taciturne répurgateur Mauger Tomas, qui en fit son élève. On raconte que tous deux s’apprêtent à partir sur les routes de l’Empire pour expurger villages, villes et cités des dernières engeances chaotiques qui s’y cachent.

Rendons aussi grâce au fantasque capitaine de la Porte Sud, Jeremy Vermer, qui, épaulé par ses deux fidèles compagnons, Jarol le Calme et Zara l’Impulsive, réussirent à repousser l’’assaut des morts sur la Porte Sud. Une mystérieuse elfe aux cheveux argentés fut des leurs, et nos quatre héros rejoignirent la dernière bataille du Grand Temple, ralliant des défenseurs épars pour briser les arrières des légions mortes.

Frère Tancrède, haut-prêtre de Sigmar, qui fut le premier confronté aux princes vampires. Tancrède se montra intransigeant avec ses hommes et il évita la débâcle face au flot de morts effrayants. Il sut animer la flamme de ses troupes pour résister à l’armada macabre pendant une bonne heure. Et même une fois ses rangs submergés Tancrède évita la panique et mena une retraite en bon ordre vers le Grand Temple. Tous s’accordent à dire que c’est lui qui organisa la dernière défense du Temple.

Justine Byrer, officier dans la péniche de patrouilleurs fluviaux « La Carpe Ecarlate ». Justine, ayant pressenti que les bêtes tenteraient de passer également par le fleuve, organisa une vraie muraille de bateaux à la jonction du Reik et du Talabec. Quand des dizaines et des dizaines d’embarcations de fortune, manœuvrés par des hommes-bêtes, furent en vue, Justyne mit le feu à des brulots, déclenchant un enfer purificateur sur les bêtes. Mais toutes ne succombèrent pas et Justine s’illustra en menant les matelots contre les envahisseurs. À noter les prouesses martiales du jeune Keller, apprenti boucher, qui fendit bien des crânes de monstres bestiaux avec son large hachoir.

Voici donc quelques noms de ceux qui n’abandonnèrent pas lors de la bataille d’Altdorf malgré toutes les menaces qui se succédaient pour détruire le cœur de l’Empire. Ils ne sont que de simples mortels qui prêtent leurs noms aux actions de tous les anonymes qui ne faillirent pas alors que la Fin des Temps s’annonçait.

Mais il reste quelques noms à évoquer, pour certains célébrés par la plèbe d’Altdorf, alors que d’autres restent inconnus, refusant toute gloire et célébration publiques.

À venir, l’épilogue des PJ…

Bien des évènements sont survenus depuis que Blytzkrieg a franchi les portes d’Altdorf.

La route a été longue depuis le Royaume Khazalide, parsemée d’embûches, mais nullement de mort libératrice.
La capitale impériale promettait bien des occasions de trouver un repos par l’acier et le sang, en ces temps sombres de guerre et d’ignobles trahisons ourdies par les seigneurs de la corruption.
Blytzkrieg rejoignit vite une compagnie marginale, dont deux frères nains, qui œuvrait sans relâche à lutter contre des menaces meurtrières, avec toute la témérité qui ouvre les portes à la grande faucheuse.
Après avoir confié Kochonou, son « fils adoptif », à la bonne garde d’hommes pieux Blytzkrieg pu se lancer à corps perdu dans les batailles qui secouaient la plus grande cité du Vieux Monde.

Les ennemis ne manquaient pas. Outre les vulgaires malandrins et les pervertis des adversaires plus féroces se présentèrent pour lancer l’assaut sur Altdorf. D’enragés hommes-bêtes, des monstres ailés et rampants, des mutants corrompus dans la chair et l’esprit.

La mort ne vint pas soulager Blytzkrieg de sa lourde existence. Mais par bonheur les morts eux-mêmes se mirent à marcher et des légions morbides submergèrent la ville. Des Princes vampires avaient jeté leur dévolu sur le cœur et l’âme de l’Empire, au soulagement de la Tueuse qui voyait cette tempête comme le signe que la mort l’invitait enfin à écrire les dernières lignes d’une existence torturée.

Mais là encore son destin se déroba à elle. Malgré les némésis qui se présentaient Blytzkrieg se relevait toujours, et brandissait encore et toujours sa large hache noire pour participer à la danse macabre.

Blytzkrieg vit alors périr l’un de ses compagnons nains, le brave et pourtant tenace Urgrim Bardinsson. Que la mort est cruelle quand elle se refuse à soi et ironiquement emporte un frère qui ne méritait pas de mourir.
Quelle tragédie de voir l’offrande de la mort bénir celui qui ne l’avait point demander alors que soi-même on se lamente de ne point trouver de fin à son déshonneur.

Amère satisfaction de voir Raflin, un frère de race, pourfendre un ennemi héréditaire du peuple nain, un grand dragon noir comme le néant. Mais Blytzkrieg doit se rendre à l’évidence alors que les cloches de la victoire impériale sonnent, sa longue existence honteuse doit se poursuivre.

Blytzkrieg, fataliste, se résigne à récupérer son Kochonou. Elle constate alors que le Temple des Chandelles a été frappé par un fléau qui a emporté les rares moines qui n’étaient pas partis en guerre, dont le doyen.
Lorsque les moines rescapés de la dernière bataille fouillèrent le Temple ils découvrirent un seul rescapé, un très jeune novice, qui raconta comment une femme recueillie inconsciente s’était éveillée dans la « nuit des Princes Vampires » et avait apporté la mort à tous ceux du Temple, hormis lui.

Heureusement ce gamin-là avait la charge de Kochonou, et le « fils adoptif » s’en était tiré aussi. Blytzkrieg, indifférente au malheur qui avait frappé le Temple s’enquis de glands à donner à son enfant chéri. Quelle importance que ces quelques morts alors que tant et tant étaient tomber, sauf elle, affligée du misérable sort qui l’accable.

Il est temps de visiter quelques auberges alors que les tonneaux de la victoire sont percés. Autant noyer avec joie son chagrin pour oublier les jours à venir.

D’autres mourront sous la hache de Blytzkrieg, jusqu’à qu’elle trouve le repos tant désiré.

Caleb Duval, bretonnien né à Couronne, ne trouva pas la mort lors de la dernière bataille à Altdorf alors que tant d’autres tombèrent.
Organisations criminelles, basses traitrises, folie de fanatiques, complots et séditions menés par l’ennemi intérieur. Tout cela parait bien insignifiant au regard des deux tempêtes qui s’abattirent successivement sur la capitale impériale.

Bêtes et morts, voilà les deux fléaux qui frappèrent la cité. EN ces temps funestes Caleb pu constater la bravoure de tous ceux qui n’avaient pas plié le genou face aux Puissances de la Ruine, tous ceux qui ne renoncèrent pas quand une nuit interminable annonçait la fin des temps.

À des lieus et des lieus de sa Bretonnie natale Caleb se retrouva à se battre aux côtés de son Roy, Louen Cœur de Lion, accompagné par ses fidèles chevaliers-hippogriffes, Pairs du Royaume et fidèles serviteurs de la Dame. Non pas pied à pied, mais à longueur de portée d’arbalète. Et accompagné par la semi-femme Fleur Vertemare, aussi vaillante que petite.

Lors de la bataille du Grand Temple Caleb assista à la confrontation de la Dame qui accompagnait le Roy contre l’un des Seigneurs Vampires. La Dame, seule, réussit à s’opposer à cette créature diabolique. Le duel fut une symbolique opposition entre la Vie et la Mort.
Jusqu’au tombeau Caleb aura la dernière image du terrible affrontement : l’épée noire du Seigneur Vampire transperçant le mince corps de la Fée, mais ressortant pour s’enfoncer profondément dans le torse du monstre sanguinaire. Aucun vainqueur, un peu moins de lumière dans ce monde, un peu moins de malheur aussi.


Mais ce n’était point la fin de la bataille, car les Dragons de Sang, comme se nommaient ces terribles chevaliers vampires, sous les ordres de leur Prince, déclenchaient les enfers sur la cité, et comme un chat jouent avec une souris, resserraient implacablement l’étau autour du Grand Temple de Sigmar.

Le Roy et ses chevaliers, montés sur leurs hippogriffes, volèrent vers les vampires pour sauver Altdorf et l’Empire. D’autres s’opposèrent aux vampires dans la mêlée meurtrière : le répurgateur Mauger Tomas, toujours aussi pugnace, et ser Erik Straffhager, implacable face aux seigneurs de la nuit.
Ainsi, quand Erik était sur le point de faillir face à un vampire aux heaume-dragon aux yeux émeraudes, Caleb, guidé par la bénédiction de la Dame, blessa fatalement le monstre par ses carreaux d’arbalète tirés avec adresse et bonne fortune.
Le soleil perçant enfin les épais nuages noirs qui maintenaient Altdorf dans les ténèbres Louen Cœur de Lion, épée et armure rayonnante de la lumière du soleil, épaulé par un Erik indéfectible, pu terrasser le Prince des Dragons de Sang.

Mais une nouvelle menace se présentait sous la forme de l’ombre d’un gigantesque félin. Dominant le Roy, Erik et Mauger, le démon semblait prêt à bondir pour les écraser. Une fois encore Erik s’interposa pour sauver le Roy et de sa lance lumineuse perça l’ombre. Caleb tira un carreau pour suppléer la pointe acérée de la lance d’Erik.

L’ombre disparu, sans doute retournée aux enfers, et chacun pu prendre conscience de la victoire, inespérée. Altdorf était sauvé et les Bretonniens, leur Roy en tête, avaient grandement participé à cet exploit qui sera chanté bien des fois, aussi bien dans l’Empire qu’en Bretonnie.

Lors du dénouement de la grande bataille d’Altdorf Caleb fut convié par le Roy Louen Cœur de Lion lui-même. Entouré de ses chevaliers survivants, dont le Duc Folcart de Montfort que Caleb avait déjà rencontré lors de la grande nuit des bêtes et des morts.
Le Roy reconnu Caleb comme un digne enfant de Bretonnie, au sang fort et à la loyauté indiscutable. Le Roy proposa alors à Caleb, si celui-ci le souhaitait, d’être adoubé chevalier, et lui promis des terres pour honorer son nom.

Caleb devait réfléchir. Quelle vie voulait-il vraiment ? Un titre ? Des terres ? Au moins sa famille pourrait en profiter. Et rien ne l’empêchait de poursuivre la vie qu’il entendait.

Mais pour l’instant il y avait plus urgent que de donner une réponse au Roy.
Les parents de Fleur Vertemare avaient été dépossédés injustement de leurs biens par un usurier, et jetés dans une basse-fosse par un juge inhumain, où tous deux étaient morts de dysenterie.

Fait incroyable, le spéculateur et escroc George Masker et sa complice, le sinistre juge Mily Rot, avaient survécu à la nuit des morts. Une aubaine. Ils ne verront pas beaucoup de jours après cela. Ce sera vite fait. Et la petite Fleur pourra enfin trouver le réconfort de la justice et emprunter à nouveau le chemin de sa vie.

Estrid reste, et restera, le plus mystérieux membre de la compagnie qui joua un rôle si important dans le siège éphémère d’Altdorf. Les plus avisés auront compris que malgré son apparence « rustique » Estrid faisait partie des magisters impériaux. Ils ne pourront en revanche pas s’étendre plus sur cette femme troublante.
Le commun des mortels connaîtra Estrid en tant qu’amante du vaurien, aussi élégant que chevaleresque, Andric Delfholf, célébrité du monde criminel d’Altdorf. Andric est plus réputé pour ses qualités de joueur invétéré et de courtisan immodéré que pour ses méfaits. L’idylle entre le dandy théâtral et la ténébreuse chasseuse fascine le petit peuple au lendemain des jours tragiques. Laissons ceux qui ont tant souffert se passionner pour une belle histoire d’amour qui allège leur peine par une distraction pleine d’espoir.

C’est pourtant cinq jours après la victoire que les autorités impériales les plus hautes eurent connaissance de l’ampleur de l’œuvre d’Estrid dans la défense d’Altdorf, de tout l’Empire et des peuples humains et nains.
En effet, les précieuses informations fournies par le Maître de Guilde Wolfram Neith, et les précisions et recommandations données par Estrid Eroff permirent de damner le pion aux époux Hirtzel, parmi les plus dangereux serviteurs des Puissances de la Ruine.
Le capitaine du « Deux-Poings », George Albaner et le capitaine du « Renard du Reik », Frederik Gom, deux bâtiments de patrouille rurale, arraisonnèrent la « Panthère du Reik », bateau que les Hirtzel avaient pris pour fuir vers Nuln. L’assaut fut de courte durée. L’équipage de la Panthère ne montra aucune solidarité envers Agnete et Admund Hirtzel et la poignée d’hommes de main qui les accompagnait. La cantatrice usa de maléfices, une dizaine de patrouilleurs, dont Frederik Gom, périrent atrocement. Mais par un coup de pistolet bien ajusté George Albaner fit sauter la boite crânienne d’Agnete Hirtzel. Son mari, Admund, se noya en tenant de fuir.
Si on ne retrouva jamais la jeune femme blonde qui accompagnait les Hirtzel comme si elle était leur propre fille le capitaine Albaner mis la main sur deux magnifiques couronnes. L’homme, aussi intègre qu’intelligent, confia aussitôt les deux objets au temple de Sigmar le plus proche.

Ainsi les deux couronnes, présentées comme œuvres kahazalides, mais maudites, volèrent vers Altdorf sous la bonne garde de Salomé Stolzer, Hérault des Chevaliers Griffons . L’ambassadeur de Karaz Ankor à Altdorf et Raflin Brise-Tibias furent conviés par l’Empereur et le Grand Théogoniste pour la restitution des deux artefacts, mais ceci concerne un autre épilogue.

Revenons donc à Estrid, car sans ses actions éclairées sans doute les deux couronnes seraient à nouveau employées pour de sinistres entreprises. Il n’y a aucun doute qu’Estrid fut largement récompensée par sa hiérarchie, quelle qu’elle soit. Ce n’est pas une femme à se satisfaire de la gloire, encore moins de la célébrité. On ne connait donc pas les profondes pensées d’Estrid, mais elle demeure toujours en retrait derrière ses compagnons, observant ce qui peut bien se tramer.

Les jours qui suivirent la victoire Gundolf se sentit perdu, frappé par un sentiment trouble qui donnait à tout un aspect irréel. Tant étaient tombés alors que d’autres vivaient. Urgrim avait rejoint ses ancêtres alors que lui était vivant, malgré les affrontements avec les effrayantes et malsaines succubes.

Gundolf reprit peu à peu ses esprits en se souvenant de cette atroce nuit des sorcières, Geheimnistag, pendant laquelle toute sa famille ainsi que tous ceux du hameau avaient trouvés à la mort. Déjà cette fois-ci il avait survécu alors que d’autres avaient rejoints précocement Morr.

Enfant il n’avait pas sombré dans la folie. Homme fait, malgré les horreurs qui l’avaient tourmenté, il avait encore su ne pas flancher. Pourtant ses nuits étaient hantées par les cris de ses frères et sœurs, de ses parents. À ces hurlements s’étaient rajoutés les ricanements obscènes des créatures démoniaques et obscènes, filles de Slaanesh, le plus répugnant parmi les Dieux Impies.

Gundolf savait pertinemment que le marteau sacré Wongaz-Grund avait préservé son esprit des nombreux maléfices des mignons des Puissances de la Ruine.
Encore un souvenir. Le doyen du Temple des Chandelles, Gerard Roffer, le saint homme, aveugle et vouté par le passage des ans, lui remettant le marteau runique afin que Gundolf puisse profiter de ses pouvoirs en ces temps sombres.
Aujourd’hui le doyen n’est plus. Il a rejoint la multitude qui a succombé à la grande nuit. Mais il a largement fait sa part en l’hiver d’une vie bien remplie au service de Sigmar.
Gundolf connait son devoir. Quand il tend Wongaz-Grund à Charles Spinn, l’ancien bras droit du doyen, devenu doyen lui-même, en lui expliquant qu’il rend ce qui appartient au Temple, les yeux de l’homme s’élargissent d’intérêt, de convoitise.
Charles tend la main vers Wongaz-Grund, sans le prendre. Il retire sa main, les yeux toujours fixés sur l’arme runique. Il tend à nouveau sa main, décidé à s’en saisir, mais ses mots dirent le contraire.
Le marteau sacré revenait à Gundolf. Il avait le pressentiment que ce serait un sacrilège de garder Wongaz dans l’enceinte du Temple alors qu’il y avait tant à faire au-dehors.

Gundolf comprit alors. Il sut en son cœur ce qu’il fallait faire.

Il trouva Blytzkrieg dans un établissement honorable du quartier nain. La liesse de la victoire permettait à la bannie d’étancher son gout pour la bière sans les regards accusateurs de ses frères de race. Gundolf lui expliqua.
Malgré la victoire à Altdorf, malgré la victoire impériale au Nord, les cendres de l’Empire étaient encore incandescentes. Les ennemis étaient légions, que ce soient les bêtes dans les forêts les plus sombres ou les cultistes dans les salons dorés les plus lumineux. Gundolf promettait à la Tueuse un avenir sous la menace constante de la Faucheuse.

La naine à la crête orange sourit et finit sa bière.

Les routes de l’Empire attendaient Gundolf et Blytzkrieg.

Ainsi Raflin avait réussi sa quête, malgré tous les doutes qui l’avaient assailli lors de la victoire. Il avait vu périr son frère de race Urgrim, le cœur serré, mais il avait conscience qu’Urgrim avait fait honneur à ses ancêtres en terrassant les ennemis de son sang.

En revanche, lui, Raflin Brise-Tibias, n’avait pas honoré la mémoire de Thar-Ordak et Thar-Grumi, puisqu’il avait échoué à retrouver les artefacts perdus. Le mystère était résolu quant à leur nature. Il s’agissait des couronnes du Roi et de la Reine de l’antique cité naine oubliée de Karak-Magar. Mais celles-ci avaient quitté Altdorf avec leurs propriétaires du moment, les corrompus Agnete et Admond Hirtzel. Raflin était abattu de frustration en imaginant les deux couronnes maudites entre les mains des deux serviteurs du Chaos, sans aucun doute destinées à créer des malheurs supplémentaires.

Raflin connut une brève période d’ahurissement quand on lui apprit que les deux couronnes avaient été récupérées par de fidèles serviteurs de l’Empire, et qu’elles étaient actuellement en la possession de la plus haute autorité sigmarite : le Grand Théogoniste et l’Inquisition qui veillaient attentivement sur elles.

Le noble soldat de Karaz-A-Karak se morigéna d’avoir eu l’orgueil de penser que tout dépendait de lui, qu’il était seul dans la lutte contre les serviteurs du chaos. Il avait œuvré sans relâche à récupérer les artefacts maudits, sans jamais penser que d’autres apporteraient leur contribution dans cette quête qui dépassait son seul égo.

Quand il se rendit à la convocation du Grand Théogoniste il s’aperçu que l’antipathique ambassadeur du Royaume Khazalide était également présent. Passé la première surprise Raflin devait convenir qu’il était logique que Bor-Anrork, Ambassadeur de Karaz-Ankor, ait son mot à dire au sujet des couronnes légendaires.

Les jours qui suivirent le triomphe d’Altdorf ne furent pas tous agréables, celui-ci fit partie des franchement déplaisants. L’ambassadeur eut le toupet de reprocher à Raflin de s’être soustrait à son commandement pour combattre à côté d’hommes. Puis il exigea que Raflin rejoigne les rangs de l’ambassade naine (qui avaient été terriblement clairsemés par les batailles) et que les couronnes lui soient transmises pour qu’elles retrouvent leur propriétaire légitime, le Haut-Roi nain, Thorgrim le Rancunier.
Ultime audace de la part de Bor-Anrok, il réclama les armes légendaires d’Urgim, le casque Far-A-Ziroki, et le marteau runique Krag-A-Ungor. Raflin ravala sa salive, prêt à apprendre la dignité à ce haut dignitaire du Royaume.
C’est le Grand Théogoniste, le sinistre mais juste Volkmar le Sévère, qui parla en faveur de Raflin. Il évoqua les desseins mystérieux des Dieux, humains et nains. Il rappela que les armes étaient le legs familial d’Urgrim Bardinsson, et qu’elles avaient été utilisées lors de la bataille de la Grande Nuit, pour sauver Altdorf et l’Empire, tout comme Ghal-Maraz le fit au cours des siècles.
Son frère de bataille, Raflin, en terrassant le Grand Dragon Noir, était le seul légitime pour définir leur destin : les confier au Royaume nain pour que les sages définissent à qui elles revenaient; les amener aux parents d’Urgrim pour qu’ils en disposent selon leur bon vouloir, ou les garder pour continuer à se battre en honorant la mémoire d’Urgrim.

Bor-Anrok s’empourprait au fur et à mesure des paroles du Grand Théogoniste mais il avait la sagesse de garder le silence face au visage de rapace de Volkmar le Sévère, élu par Sigmar pour faire triompher la foi sigmarite lors de la Fin des Temps.

XXX

Après un court silence Volkmar demande à un moine qu’on fasse rentrer quelqu’un. Quand un nain fait irruption dans la pièce l’ambassadeur finit par devenir écarlate. Car le port du nouveau venu ne fait aucun doute : il s’agit d’un maître parmi les maîtres nains, un Maître des Runes.

Volkmar, le visage impassible, mais les yeux flamboyants, parle à nouveau :

-« Quant aux couronnes, elles sont trop dangereuses pour qu’on les envoie avec légèreté dans un long voyage vers la lointaine Karaz-A-Karak. Mais notre ami ici » dit-il en désignant le maître des runes « va nous faire bénéficier de sa science… »

Ainsi Urgrim est tombé lors de la dernière bataille d’Altdorf, terrassé par le Grand Dragon Noir.

Nain anonyme de l’Empire Urgrim se couvrit de gloire lors des jours où la cité fut mise à l’épreuve. Des profondeurs oubliées et obscures jusqu’aux tours des palais les plus cossus Urgrim ne recula jamais face aux ennemis de l’Empire.
Sans doute n’y a-t-il pas eu de vaillant guerrier qui ait affronté et surmonté autant de dangers que lui. Il accomplit son destin en se coiffant du casque de ses lointains ancêtres et en brandissant le marteau runique fléau de démons. Urgrim peut ainsi regagner, la tête haute, les salles de ses Pères où il festoie assurément sans honte.

Mais une légende naît au détour des récits officiels qui se transforment peu à peu en rumeurs chuchotées. Car certaines bouches inconnues rapportent qu’Urgrim contracta un pacte avec de mystérieuses puissances de la nuit. Le mot « vampire » est parfois murmuré dans des lieux secrets. Certains osent même remettre en cause la mort du héros. Urgrim se serait vu privé du repos des mortels pour devenir un spectre hantant la capitale.
Une superstition supplémentaire que les gens de foi s’échinent à dissiper. Malgré leurs efforts le mythe du nain devenu un redoutable serviteur d’une Reine Vampire prend de la force et devient partie intégrante du folklore altdorfien.

Heureusement ces histoires indignes ne parvinrent pas aux oreilles des parents d’Urgrim, à Delberz, les dignes Mordrin et Snorra Bardinsson. Le frère de bataille d’Urgrim, Raflin Brise-Tibias, livra à ses parents Far-A-Ziroki et Krag-A-Ungor, le casque et le marteau des ancêtres Bardinson, lors d’une cérémonie sur la place principale de la ville, où fut honoré comme il se doit Urgrim.
Mordrin et Snorra confièrent alors le marteau runique à Raflin en lui demandant de faire vivre la mémoire d’Urgrim en brandissant à son tour Lune des Cavernes.

C’est donc avec la bénédiction du sang d’Urgrim que les héros qui ont combattu à ses côtés peuvent reprendre leur marche vers un avenir que leur ami a contribué à rendre possible.